telle dent telle morsure

Marie
Bette

telle dent telle morsure

09.06 — 01.07.23
Vernissage: 

jeudi 8 juin dès 16h

Ça tient.

La gouttière tient, le genou tient, les harengs tiennent, la table tient, la lumière tient. On n’a pas suivi la recette et ça tient.

Prendre des pierres et les disposer comme si c’était un gros genou, poser dessus du jeans enduit de cire, le chauffer au sèche-cheveu jusqu’à ce qu’il ramollisse – le jeans ciré moule les pierres comme du chocolat qui moule les cacahuètes d’un snickers glacé. Insister avec le sèche-cheveu jusqu’au degré de moulage maximal, retirer la coque de jeans ciré une fois refroidie. Grosse genouillère.

Ça tient à hauteur d’œil par des ligaments trop grands ; le latex adhère aux saillances d’un absent (le genou ou les pierres). Reste au verso une coque tapissée d’un cuir de fruit sombre. Plus loin ce n’est pas vraiment du cuir non plus, c’est mat et foncé, presque tendu, mais ça résiste à la mise à plat. C’est du butyle qui a pris la forme de son moule (une chambre à air) mais on l’a coupé, on l’a dégraissé à l’alcool, détalqué, débarrassé de son traitement anti-adhérence, parce qu’on veut que ça adhère, on veut que la lumière tienne, on veut rendre sa micro-porosité affleurante. Les coutures encaissent les tensions car ça tire aux quatre pieds (d’une table trop basse ou d’une demi-cabane). Mais ça ondulera toujours un peu, ça ondulera dans la tension, comme une nageoire-jupe de seiche.

Ça ne sent plus les hydrocarbures ni le suint, il n’y a plus de matière brute, on a tout raffiné, dégraissé, amalgamé, dilué ou concentré.

Les chaînes polymériques diffèrent entre la chambre à air et le goudron de bouleau (brai) ; ça persiste à sentir mais ça s’immobilise dans un léger creux. Cette fois pas de résistance, la surface est parfaitement plane. La forme pourtant aurait aimé s’échapper. Mais c’est le Rhône qui coule sous ses pieds.

On s’accroche.

Il nous faut un portant en acier, bien lesté mais pas droit, en fait incliné (avenant). Comme des harengs fumés, des lés alignés pendent du plafond au sol ; trempés dans le même bain, ils viennent du même troupeau. C’est presque sec. On a lutté contre le jaunissement crasse, mélangé les cheveux bleus aux cheveux sales, mêlé les fibres à l’aiguille harpon, jusqu’à un point précis de densité. C’est dense donc c’est silencieux (force tranquille du troupeau). Mais pour ne pas étouffer on a percé des œilletons et ça a libéré du gras.

L’œil accroche et voit dans une gouttière en papier-mâché un schéma d’adduction des eaux. Or c’est encore poreux, ça ne conduit rien mais ça danse en silence (patins), ça se cabre, ce n’est pas un squelette.

D’ailleurs ça s’adresse plutôt à l’ongle qu’à l’os.

Sarah Holveck, Gaëlle Cognée et Luca Guizzo

Horaires: 

mardi - samedi 14h/18h